Bodyfiction(s) 2
Tout comme la peinture et la sculpture, la photographie se réclame d’une longue tradition où la représentation du corps – de l’homme et de la femme – tient une place importante. Aux cours de ces dernières décennies, la critique de la représentation du corps – particulièrement celui de la femme – a occupé une position centrale dans les débats critiques notamment sous l’impulsion d’artistes-femmes dans la mouvance des revendications féministes.
Dans les années 60 et 70, cette contestation dans le milieu artistique avait une composante politique très affirmée.
Quelque cinquante ans plus tard – si la contestation des modèles et des clichés continue à être présente dans la production artistique – les approches ont bien changé.
Objet de fantasmes et de projections multiples, le corps devient un miroir où se retrouvent les fictions de notre société. D’où le titre de « fictions corporelles », Bodyfiction(s), donné à cette exposition.
La pratique d’une artiste comme Alix Marie se situe au croisement de pratiques de photographie et de sculpture. Son travail affiche une réelle tridimensionnalité et implique photographie comme des éléments sculpturaux. Dans sa façon de représenter l’intimité du corps, l’artiste scrute chaque détail de la peau, les lèvres, la bouche et pénètre pour ainsi dire dans le tissu même du corps. L’œuvre ici est une enquête sur la façon de représenter l’intimité, ces moments où le corps de l’autre est hypertrophié par l’oeil de la caméra.
Le monde de Carina Brandes est magique et habité d’une autre manière. Si on trouve dans son monde des fées au comportement quelque peu surprenant, on y trouve aussi des corps éventrés, des figures cauchemardesques, on pénètre avant tout dans un monde entre chien et loup. Souvent la nuit noire couvre des agissements curieux de femmes explorant et implorant l’espace. Cela nous rappelle les mondes magiques, les terrains de jeux de notre enfance, hantés par des êtres curieux ou alors le monde d’Alice au pays des merveilles où l’innocence rencontre l’absurde.
Dans le travail photographique de Katrin Freisager – enchevêtrement sensuel, parfois sauvage, des bras et des jambes – on découvre à la fois un monde où les couleurs pastel atténuent la dynamique des contorsions et où la composition étudiée semble vouloir faire oublier le frôlement érotique des corps. Les collants, les jambières ou autres bandages emprisonnent les membres, tout comme ils figurent aussi une sorte de protection contre des agressions possibles.
Connue dès les années 80 pour avoir bouleversé tous les canons de la beauté, ORLAN fait partie de cette première génération de femmes qui n’ont vu dans le corps qu’un habitacle et qu’il était permis de le transformer à volonté pour le faire correspondre à ses désirs, parfois en le changeant radicalement.
Les interventions sur le corps deviennent alors une tentative de se sculpter soi-même et de trouver une des figures possibles de soi-même.
Star d’Instagram, Arvida Byström joue et se joue de son propre rôle et de sa célébrité en caricaturant – tout en restant dans un rose dominant très féminin – certains clichés érotiques qui accompagnent les idées que se font – hommes et femmes – de la féminité et de la séduction.