A room of one’s own
L’exposition tire son nom du livre A Room of One’s Own écrit par Virginia Woolf, l’une des romancières modernistes les plus remarquables du XXe siècle. Woolf y évoque les inconvénients d’être une femme dans le monde de l’art dominé par les hommes – en particulier sur la scène littéraire – et propose des moyens de faire ressortir la créativité des femmes à travers des histoires qui oscillent entre réalité et fiction.
L’exposition A Room of One’s Own réunit des artistes qui résistent aux conventions et transcendent les frontières dans leurs travaux photographiques documentaires qui s’apparentent à la fiction. Chaque artiste cherche les traces de son identité dans la mémoire collective de sa ville natale, les traditions et les récits du passé.
Cansu Yıldıran (née en 1996, Turquie) a photographié sa ville natale de Caykara, dans la région de la mer Noire, où la tradition interdit aux femmes de posséder une maison ou des terres. Même si la migration saisonnière fait encore partie de la culture des habitants de la région, dont la plupart sont des descendants grecs, les femmes doivent relever d’autres défis pour conserver un sentiment d’appartenance et d’identité. À travers la série Dispossessed (Dépossédées), Yıldıran se lance dans un voyage personnel à la recherche de ses racines tout en posant des questions sur la dynamique du pouvoir dans une société en constante évolution.
Ofir Berman (né en 1991, Israël) saisit la vie quotidienne d’une communauté qui défie le temps et l’espace au milieu d’Israël, l’un des pays les plus avancés sur le plan technologique. Les habitants de Mea Shearim résistent aux normes du 21e siècle. Ce quartier isolé invente ses propres règles. En errant dans Mea Shearim, Berman se retrouve parmi de «vieux» enfants et de «jeunes adultes» – ou comme si les adultes étaient piégés dans des corps d’enfants. En tant qu’étrangère, en tant que femme, en tant que photographe, elle ne peut ni se cacher ni se fondre dans cet environnement. L’appareil photo devient son seul lien avec le monde extérieur, où elle a peur d’être remarquée.
Dans 80 Miles to Atlantis, Imane Djamil (née en 1996, Maroc) photographie les habitants de la côte historique de la ville saharienne de Tarfaya qui vivent parmi les fantômes du passé. Les vestiges de l’architecture qui deviennent son terrain de jeu mêlent le passé colonial et le présent postcolonial de sa ville natale. Les ruines reviennent à la vie dans les scènes de Djamil, qui ressemblent à des images de film, brouillant ainsi les frontières entre réalité et mythe. L’artiste critique l’apathie de l’État à l’égard de la préservation de son patrimoine culturel.